Dahya Eddine Bentaleb/Unsplash
12 May 2023 Récit Ocean & Coasts

Comment le secteur du tourisme peut-il se libérer du plastique ?

Dahya Eddine Bentaleb/Unsplash

Le tourisme international est en train de retrouver ses niveaux prépandémie, deux fois plus de personnes ayant voyagé jusqu’à présent en 2023 qu’à la même période l’an dernier. L’activité de ce secteur est considérable : entre 1980 et 2019, les arrivées de touristes internationaux ont augmenté, passant de 177 millions à près de 1,5 milliard par an.

Toutefois, sans surprise, le tourisme contribue de façon significative à la crise mondiale de la pollution plastique. Huit touristes sur dix visitent des zones côtières, s’ajoutant aux huit millions de tonnes de plastique qui pénètrent dans les océans chaque année. Beaucoup d’hôtels sont également remplis de bouteilles de shampooings, brosses à dents et peignes en plastique à usage unique. Dans le même temps, les navires de croisière déversent de vastes quantités d’eaux usées chargées de microplastiques dans les océans.

Un rapport collectif publié en 2021 par le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) et le World Travel & Tourism Council souligne un besoin de coordination en ce qui concerne les actions, les politiques et les infrastructures pour entraîner le secteur vers la circularité.

Il est plus urgent que jamais d’agir. Chaque année, l’humanité produit environ 430 millions de tonnes de plastique, dont les deux tiers sont des produits à courte durée de vie qui deviennent rapidement des déchets. Au total, 99 % du plastique est fabriqué à partir de substances chimiques provenant de sources polluantes et non renouvelables. La majorité du plastique ne disparaît jamais réellement. Au lieu de cela, il se désagrège, et des particules de plastique sont ingérées par des poissons ou des animaux d’élevage, avant d’être consommées par l’être humain en passant par les aliments et l’eau du robinet.

Néanmoins, la popularité du plastique continue de croître, sa production ayant été multipliée par plus de 22 au cours des 50 dernières années. Dans un scénario de statu quo, le plastique pourrait être à l’origine de 19 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre à l’horizon 2040.

Le lien entre le plastique et le tourisme n’est pas une coïncidence. Les produits en plastique à usage unique sont des moyens efficaces et économiques de se conformer aux normes en matière de santé, de sécurité et d’hygiène tout en garantissant des séjours sereins aux touristes.

Transformer le tourisme

Dans le cadre du projet de transformation du secteur du tourisme financé par l’Initiative internationale pour le climat du Ministère fédéral allemand de l’environnement, de la conservation de la nature et de la sûreté nucléaire, des hôtels de Maurice, des Philippines, de la République dominicaine et de Sainte-Lucie montrent qu’il est possible de développer des modèles commerciaux novateurs afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre et d’utiliser les ressources de façon plus rationnelle.

Joegil Magtanggol est gérant du Club Paradise Palawan aux Philippines, un hôtel travaillant également en étroite collaboration avec le PNUE pour supprimer progressivement les produits en plastique à usage unique et sensibiliser ses clients à cette question dans le cadre de la campagne relative au projet de transformation du secteur du tourisme, intitulée « Phasing Out Problematic Single-Use Plastics ». Au fait des difficultés pour se procurer en grande quantité des produits respectueux de l’environnement dans les limites d’un budget restreint, M. Magtanggol décrit la transition comme un ensemble de « petits changements ».

Toutefois, ces petits changements ont eu des effets importants. L’hôtel fournit désormais à ses clients des articles de soins de qualité alimentaire produits en Australie en utilisant des contenants rechargeables ; emballe les repas à emporter dans des contenants en matériaux biodégradables, tels que l’amidon de manioc ; se procure et purifie ses propres eaux plate et gazeuse et les sert dans des bouteilles en verre réutilisables.

En plus de supprimer les besoins d’approvisionnement en bouteilles d’eau, la réduction globale de l’utilisation d’articles jetables signifie également qu’il y a moins de déchets, et par conséquent un coût inférieur pour les évacuer de l’île. En outre, M. Magtanggol ajoute que bien que les frais généraux puissent être supérieurs dans l’immédiat, « les retombées à long terme de la protection de l’environnement valent chaque centime dépensé ».

Club Paradise palawan
Photo : Club Paradise Palawan

Protection et conservation

Pour le Club Paradise Palawan, l’eau et les côtes qui l’entourent sur l’île philippine de Dimakya sont parmi ce qu’il y a de plus précieux. En contribuant à la conservation de l’écosystème marin, l’hôtel protège également les récifs coralliens spectaculaires qui font la renommée de cette zone, et continue d’attirer des amateurs de plongée du monde entier.

L’île de Dimakya se situe dans une réserve de biosphère de l’UNESCO. Ainsi, la démarche de réduction des déchets plastiques n’est pas seulement idéaliste, elle est également pragmatique. « Le meilleur moyen de promouvoir cette offre unique au monde est de faire en sorte que le fonctionnement de l’île reste propre, écologique et durable », souligne M. Magtanggol.

L’expérience des touristes en est la preuve. En 2020, une année particulièrement difficile pour le secteur du tourisme, l’hôtel a reçu une récompense le qualifiant de destination durable et a été élu « Travellers' Choice Best of the Best » de Tripadvisor.

Dans le cadre de l’Initiative mondiale sur les plastiques dans le secteur du tourisme, dirigée par le PNUE et l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) en collaboration avec la Fondation Ellen MacArthur, des gouvernements, des entreprises et la société civile s’efforcent de réduire la pollution plastique et contribuent au mouvement en faveur de la circularité.

Cette alliance entre dans la logique du changement systémique promu par l’Engagement mondial pour une nouvelle économie des plastiques et vise à aider le secteur des voyages et du tourisme à participer à ces efforts déployés à l’échelle mondiale. Plus de 500 institutions et entreprises représentant plus de 20 % des emballages plastiques utilisés à travers le monde et des gouvernements de cinq continents contribuent déjà à la réalisation de cet engagement par l’entremise d’actions concertées.

La refonte de nos habitudes, en particulier concernant l’utilisation de produits en plastique à usage unique, n’appelle pas un changement à l’échelle d’un hôtel ou même d’un secteur. Au lieu de cela, il est nécessaire que chaque partie prenante apporte sa contribution, des gouvernements et responsables politiques aux entreprises et consommateurs.

 

Ce récit a initialement été publié le 29 juin 2021 et a été mis à jour.

 

À propos de la Journée mondiale de l’environnement

La Journée mondiale de l’environnement, organisée le 5 juin, est la plus grande journée internationale consacrée à l’environnement. Dirigé par le Programme des Nations Unies pour l’environnement et célébré tous les ans depuis 1974, cet événement est devenu la plus grande plateforme mondiale de sensibilisation à l’environnement, voyant plusieurs millions de personnes du monde entier s’engager en faveur de la protection de la planète. Cette année, la Journée mondiale de l’environnement sera axée sur les solutions à la crise de la pollution plastique.

 

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